L’Afrique réagit aux crimes du régime sioniste

10:56 - May 16, 2021
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Téhéran(IQNA)-Les nouveaux affrontements entre Israël et les Palestiniens ont suscité indignation et protestations aux quatre coins du monde. En Afrique : l'Union africaine s'est empressée de réagir en demandant dans un communiqué une désescalade.

En Afrique du Sud, la solidarité avec la Palestine s'est exprimée avec une vigueur particulière. En effet, aux yeux de nombreux Sud-Africains, la similitude est vivace entre la situation vécue par les Palestiniens et le régime de l'apartheid. Certains critiques, notamment l'ONG Human Rights Watch, ont accusé la politique israélienne à l'égard des Palestiniens d'être une forme d'apartheid, en référence à l'ancien système de gouvernement de la minorité blanche en Afrique du Sud.

En Afrique du Sud, des manifestants consternés
Mardi, le Cap, deuxième ville du pays, a accueilli une manifestation spontanée de plusieurs centaines de personnes, au lendemain de nouveaux affrontements sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem. Ils ont comparé l'occupation israélienne au régime honni qu'ils ont connu. Les manifestants ont aussi réclamé la « fin de l'occupation illégale de la Palestine ». Muni de drapeaux palestiniens, le cortège, emmené par une fanfare d'écoliers en uniforme bleu, a scandé « Libérez, libérez la Palestine », « À bas, à bas Israël », rapporte l'AFP.

Protesters demand South Africa boycott, divest and impose sanctions on Israel. About 300 people marched to Parliament on Tuesday afternoon to protest against the recent deadly Israeli air strikes in the Gaza Strip.https://t.co/cts4rNWhmZ

— This Is Africa (@ThisIsAfricaTIA) May 12, 2021
Dans la foule, plusieurs figures politiques. Ainsi du député de l'ANC, par ailleurs petit-fils de l'ancien président Nelson Mandela, Mandla Mandela. Il a appelé à « la fermeture de l'ambassade d'Afrique du Sud à Tel-Aviv ». « Il a été choquant, mes frères et sœurs, d'être témoin de ce qui se passe à Sheikh Jarrah ainsi qu'à Al-Aqsa. Nous ne pouvons plus nous taire », a-t-il dit dans des propos rapportés par la presse nationale.

Si les Sud-Africains se mobilisent, c'est parce que « ça nous rappelle la brutalité de la police, ça nous rappelle le régime de l'apartheid », explique à l'AFP Kashiefa Achmat, 56 ans, militante associative. Quant à Kauthar Adams, étudiante de 21 ans, elle regarde le conflit israélo-palestinien « à la télé depuis toujours ». Les affrontements sur l'esplanade des Mosquées l'ont choquée : « Je me sens personnellement liée à tout ça. » « Des gens meurent, des gens sont déplacés, des gens sont blessés et sont traités injustement. Nous avons subi la même chose ici », a confié Tasneem Saunders, une prof de 31 ans. « Comment ne pas soutenir, comment ne pas avoir de sympathie pour ces gens ? » souffle Magamat Zain, musulman de 44 ans qui porte le drapeau palestinien autour du cou, précisant que les manifestants viennent d'horizons divers.

D'autres rassemblements, organisés par le mouvement Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS), ont eu lieu le même jour, notamment à Sandton, banlieue aisée de Johannesburg. Mercredi, même effervescence dans les rues du Cap. Cette fois, les partis politiques étaient largement représentés : ANC, le Good Party mais aussi le parti des Combattants pour la liberté économique (EFF), ainsi que des organisations dont la fédération syndicale Cosatu, a constaté le journal Daily Maverick. « Nous sommes solidaires du peuple palestinien. Quand on se tait, on est complice. Quand nous sommes absents, nous sommes complices. Nous ne sommes pas prêts à être complices », a déclaré le député du Cap-Occidental et secrétaire général du Good Party, Brett Herron. « Nous appelons à des sanctions sévères et significatives contre le gouvernement israélien », a-t-il insisté. Quelques heures avant, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a condamné, au nom du Congrès national africain (ANC) au pouvoir, « les expulsions illégales de Palestiniens de leurs maisons » ainsi que « les attaques brutales contre les manifestants palestiniens » sur le dôme du Rocher.

Malgré des trajectoires opposées en apparence, l'Afrique du Sud et Israël ont à certains moments de l'histoire tissé des liens étroits malgré la présence dans le régime raciste du Parti national sud-africain d'antisémites notoires. À ces nombreuses voix s'est aussi ajoutée celle de la Fondation Desmond Tutu. Dans un communiqué, celle-ci a appelé à mettre fin à des décennies de soutien au régime israélien de l'apartheid. « Le gouvernement israélien doit être obligé de respecter le droit international et de cesser immédiatement les expulsions illégales, l'annexion et l'oppression contre le peuple palestinien », peut-on lire dans le texte.

L'Union africaine « condamne fermement »
La réaction est aussi ferme au sein de l'Union africaine, dont le président de la commission, Moussa Faki Mahamat, a « condamné fermement » dès mardi soir les « bombardements » dans la bande de Gaza. « Le président de la Commission réaffirme que les actions de l'armée israélienne, y compris les évictions illégales, continues et par la force de Palestiniens de leurs foyers à Jérusalem-Est sont en flagrante violation du droit international », indique le communiqué. Le chef de l'exécutif de l'organisation continentale « réaffirme le fort soutien de l'UA au peuple palestinien dans sa quête légitime d'un État indépendant et souverain avec Jérusalem-Est comme capitale ». Le diplomate tchadien a également appelé « à des efforts internationaux renouvelés et sincères pour trouver une solution juste et durable au conflit, une solution fondée sur l'existence de deux États, Israël et la Palestine ».

La Tunisie demande une déclaration de l'ONU
La mobilisation sud-africaine a eu un écho favorable également du côté de la Tunisie, où le gouvernement a condamné une « agression contre les Territoires palestiniens » menée par Israël. Elle a appelé la communauté internationale à « assumer ses responsabilités ». En dépit du confinement lié à la pandémie de coronavirus en vigueur jusqu'à dimanche, quelques dizaines de militants de la société civile ainsi que des responsables de partis de gauche et nationalistes arabes ont manifesté jeudi devant la Kasbah, siège du gouvernement tunisien, a constaté l'AFP. « Libérons Al-Qods » (Jérusalem en arabe), « Avec mon âme et mon sang, je défends Al-Aqsa », mosquée située dans l'enceinte de l'esplanade des Mosquées à Jérusalem, ont notamment scandé des militants défilant contre l'« apartheid », « l'agression sioniste », en brandissant des drapeaux palestiniens. Ils ont manifesté brièvement à l'appel du puissant syndicat UGTT, de la Ligue tunisienne de défense des droits de l'homme et de divers partis d'opposition. « Le silence des pays arabes s'explique, car la majorité des pays arabes ont des relations directes avec l'État sioniste », a déclaré à l'AFP Samir Cheffi, secrétaire adjoint général de l'UGTT.

La Tunisie, qui siège actuellement au Conseil de sécurité de l'ONU, a présenté avec la Norvège et la Chine un projet de déclaration réclamant « à Israël d'arrêter les activités de colonisation, de démolitions et d'expulsions » de Palestiniens, « y compris à Jérusalem-Est ». Mais cette déclaration n'a toujours pas été adoptée par le Conseil de sécurité, qui doit se réunir en urgence dimanche en raison de l'opposition des États-Unis.

Appel à l'apaisement au Sénégal
En Afrique de l'Ouest, on note quelques échos surtout dans « les pays musulmans ». À l'instar du Sénégal, où le président Macky Sall a appelé, ce jeudi, « Israël et les Palestiniens à la désescalade ». Une réaction qui s'explique par le fait que le Sénégal, pays ouest-africain musulman à près de 95 %, préside depuis le milieu des années 1970 le Comité onusien pour les droits inaliénables du peuple palestinien. Proche du monde arabo-musulman, il a aussi des relations avec Israël, un des premiers pays à reconnaître son indépendance en 1960. Malgré cela, des voix se sont élevées dans le pays pour presser le pouvoir à s'exprimer sur la crise.

Dans un message télévisé adressé aux musulmans et aux chrétiens à l'occasion de la célébration concomitante de la fin du ramadan et de l'Ascension, le président sénégalais a lancé « un appel pour une désescalade afin que la paix revienne et que les discussions saines et sereines puissent être engagées entre ces deux communautés dans le respect du droit international ». Outre la présidence du Comité pour les droits inaliénables du peuple palestinien, « Israël est également un partenaire. Nous l'invitons à tenir compte de la situation et à agir dans le sens de l'apaisement », a-t-il dit. Dans un communiqué publié par ailleurs, le gouvernement « condamne le recours à la violence sous toutes ses formes » entre Israël et les Palestiniens, et « réitère son attachement à l'avènement d'un État palestinien viable coexistant avec l'État d'Israël ».

Les relations entre les pays africains et Israël ont fluctué au gré du conflit israélo-palestinien. Le Sénégal avait par exemple co-parrainé en décembre 2016 la résolution 2334 du Conseil de sécurité condamnant la colonisation israélienne dans les Territoires palestiniens. Cette résolution avait ulcéré le gouvernement israélien qui avait pris des sanctions diplomatiques et économiques contre le Sénégal. Les deux pays avaient annoncé la normalisation de leurs relations en juin 2017 lors du sommet de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) au Liberia, où Benyamin Netanyahu avait été invité.

Une mobilisation timide ailleurs sur le continent
Ailleurs sur le continent, entre restrictions liées à la pandémie et répression, il a été difficile de mobiliser sur le sujet. Au Kenya, la police a dispersé les manifestants aux moyens de tirs de gaz lacrymogènes, à Nairobi. Les manifestants ont sorti le drapeau palestinien et des banderoles sur lesquelles on pouvait lire très clairement des slogans tels que « Les Kenyans soutiennent la Palestine » ou « Notre liberté est incomplète sans la liberté de la Palestine – Nelson Mandela ».

Depuis le début de ce nouveau cycle de violences lundi, 103 Palestiniens, dont 27 enfants, ont été tués dans la bande de Gaza, et 580 autres blessés, selon un dernier bilan du ministère local de la Santé. Des funérailles d'une dizaine de chefs de la branche armée du Hamas ont eu lieu en journée. En Israël, sept personnes ont péri, parmi lesquelles un enfant et un soldat.

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